Quand le fantôme d’Amazon fait frissonner les élus normands

Quelles que soient ses intentions, réelles ou supposées, le géant du e-commerce Amazon est prévenu : il n’est pas le bienvenu en Normandie ! Tout du moins sur le territoire de Caen-la-Mer et de la commune de Rouen.

Les deux collectivités l’ont signifié, à quelques semaines d’écart : elles s’opposent à l’installation de centres logistiques d’Amazon à proximité de leurs villes centre. Près de Caen (Calvados), c’est la maire de Mondeville Hélène Burgat (DVG) qui a la première tiré la sonnette d’alarme en novembre dernier à propos du projet d’implantation sur sa commune d’un centre logistique d’Amazon de 10 000 m². Un appel relayé le 12 décembre 2019 par le conseil communautaire de Caen-La-Mer présidé par Joël Bruneau (LR) qui ce jour-là s’est engagé « à s’opposer à tout projet d’implantation d’une plateforme Amazon » sur le territoire de la collectivité.

Site de l’ex-raffinerie Petroplus où était envisagée l’implantation d’Amazon. © G.D.

Du côté de Rouen, c’est le 29 janvier dernier, à l’occasion de l’ultime réunion du conseil municipal de la mandature, que les groupes EELV et communistes ont soumis au vote une motion s’opposant à une implantation, envisagée cette fois-ci sur le site de l’ex-raffinerie Petroplus… située sur la commune de Petit-Couronne.

« Porter ça sur le débat public pour inciter Amazon à aller voir ailleurs »

La société Valgo, qui a racheté le site en 2015, souhaite y développer des activités logistiques. Elle travaille pour ce faire avec le promoteur Gazeley dont l’un des principaux clients en France n’est autre qu’Amazon. Un lien ténu qui aura suffi, semble-t-il, à déchaîner les adversaires du géant du e-commerce.

Cyrille Moreau, conseiller municipal rouennais (EELV) et vice-président à la Métropole Rouen Normandie, résume la situation : « le 4 novembre dernier lors de la présentation au conseil métropolitain du plan de financement (un million) des accès au site nous avons demandé la liste des entreprises susceptibles de s’installer »… Une liste sur laquelle ne figure pas le nom d’Amazon alors que son nom ressort au même moment dans la presse locale. D’où, explique-t-il, la volonté des élus communistes et Verts à travers le vote d’une motion « de porter ça sur le débat public pour inciter Amazon à aller voir ailleurs ! » Une posture de lanceur d’alerte pour dénoncer pêle-mêle « le modèle économique » d’Amazon et les risques qu’une telle installation ferait peser sur le commerce local.

Un projet potentiellement créateur de plusieurs centaines d’emplois

Soutenue par les élus socialistes de la majorité qui dénoncent, par la voix de l’adjoint en charge du commerce Bruno Bertheuil, « un souci éthique et un souci commercial », la motion est pourtant loin de faire l’unanimité. Au sein du conseil municipal, en premier lieu, où l’élu d’opposition Robert Picard (UDI) dénonce « l’hypocrisie des élus municipaux qui siègent à la métropole et qui feignent de découvrir cette possible implantation ». Et qui choisissent le terrain municipal pour porter un débat « qu’il aurait été beaucoup plus difficile de tenir à l’échelle de la métropole où certains maires regardent en priorité la question des emplois ».

Comme en témoigne la réaction de Dominique Randon, le maire (PS) de Petit-Couronne, siège de l’ex-raffinerie Petroplus, qui s’interroge dans une tribune qui a fait le tour des réseaux sociaux : « comment des élus responsables peuvent s’opposer à un projet qui pourrait créer plusieurs centaines d’emplois ? » Avant de conclure par une mise en garde à l’attention de ses partenaires rouennais : « la ville-centre veut-elle élargir son hégémonie au-delà de son territoire ? Si tel était le cas, ce serait inquiétant pour la future présidence de la métropole. »

A coup sûr un sujet qui risque d’animer le « 3e tour » des municipales, à savoir l’élection du futur président de la Métropole Rouen Normandie.

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