Après avoir dévoilé les grandes lignes de leur travaux aux élus régionaux, les coprésidents du Giec normand Benoit Laignel et Stéphane Costa sont venus aux 4e Rencontres normandes du développement durable pour alerter sur les conséquences prévisibles du réchauffement climatique dans la région. Avec un seul mot d’ordre : il est temps d’agir !
Né très officiellement le 17 décembre 2019, le Giec normand impulsé par la région Normandie a livré les conclusions de son premier rapport d’étape. Une projection à horizon 2100 des conséquences du réchauffement climatique sur une région bordée de littoral et traversée par l’un des cinq plus grands fleuves français.
Premier enseignement, « le réchauffement climatique est déjà à l’œuvre sur notre territoire », confirme le coprésident du Giec normand, Benoît Laignel. professeur à l’université de Rouen, environnementaliste réputé déjà membre du Giec international ainsi que de celui de la Métropole Rouen Normandie. Il souligne d’emblée « la hausse observable des températures depuis plusieurs décennies (entre + 0,6 C° et + 0,8 C°) qui se traduit par un passage de 15 à 35 du nombre de jours par an au-delà de 25 C°, avec en corollaire une diminution notable du nombre de jours de gel, de neige ou de brouillard ».
Le littoral fortement affecté
Si l’horizon de l’étude fixe une échéance à 2100, l’urgence à réagir n’en est pas moins grande. « Nous sommes dans une situation d’urgence climatique et nous devons réagir dans les dix ans qui viennent pour aller vers les scénarios les plus optimistes », prévient l’universitaire. Dans le meilleur des cas, si rien n’est fait, les températures pourraient augmenter en moyenne de 0,7 C° à 1 C° en Normandie. Scénario peu réaliste de l’aveu même de Benoit Laignel, qui tranche avec les + 4 C° de la version la plus pessimiste.
Quoi qu’il en soit, le réchauffement climatique aura fatalement des implications en termes d’élévation du niveau de la mer qui pourrait atteindre 1 m d’ici à la fin du siècle, tout comme en matière de précipitations moyennes annuelles qui pourraient diminuer de – 3 % à – 15 %. Conditions propice à des aléas extrêmes beaucoup plus fréquents, tant en précipitation qu’en épisodes de fortes chaleurs : « hors littoral, on pourrait connaître 30 à 40 jours supplémentaires par an supérieurs à 30 C° », s’alarme le coprésident du Giec régional.
Un risque accru d’inondations de sites Seveso
Dans ce tableau sans concession, le littoral et l’axe Seine sont, sans surprise, « les zones les plus sensibles au changement climatique ». Davantage de précipitations extrêmes entraînent davantage de crues, phénomène qui s’additionnant à l’élévation attendue du niveau de la mer engendrerait des inondations plus fréquentes et plus intenses. Un scénario dans lequel « les nombreux sites Seveso de la boucle de Rouen seraient inondés même en cas de crues modérées » alors qu’aujourd’hui le risque est lié à des crues intenses couplées à des coefficients de marées élevés. Un phénomène qui pourrait même, estime Benoit Laignel, se matérialiser dès 2050 !
Au final, quelles pourraient être les conséquences de ces conditions dégradées sur le trafic fluvial ? Sur ce point pas de certitudes mais déjà quelques hypothèses : « Nous allons vers une augmentation des contrastes : l’été le niveau de l’eau sera très bas dans les rivières et fleuves ». Avec quelles conséquences pour le trafic fluvial ? « Il faut se poser la question dès aujourd’hui », prévient Benoit Laignel.