Fondateur de la société rouennaise Orion 1.7, Mounir Megherbi a fait ses armes dans le digital naissant des années 2000 avant de mettre son énergie au service d’un projet innovant de « bureau opéré », à la frange du coworking et de l’hôtel d’entreprises.
Le touche-à-tout normand du marketing digital n’a pas attendu qu’on lui donne un nom pour développer dans sa ville d’adoption, Rouen, ce concept venu des Etats-Unis : le bureau opéré. Une manière d’envisager le partage de locaux professionnels qui se veut une réponse adaptée aux PME et autres ETI du principe bien connu du coworking. Et si la parenté est réelle, Mounir Megherbi insiste surtout sur les différences. « J’ai avant tout cherché à répondre aux besoins des entreprises qui souhaitent avoir leurs propres bureaux au coeur d’un écosystème ». Voilà toute la promesse d’Orion 1.7, une « constellation d’entreprises » née en 2020 en pleine crise sanitaire et qui a su absorber ce choc initial pour rapidement trouver sa vitesse de croisière. Un contexte qui, au final, se sera révélé plutôt comme un accélérateur, reconnaît l’entrepreneur : « j’étais dans le bon timing ! »
Pionnier du bureau opéré
Désormais, et même si l’état actuel du marché de l’immobilier freine quelque peu ses ardeurs, Mounir Megherbi ne cache pas son ambition de développer sa marque dans les trois métropoles normandes. Pionnier, hors Paris, du concept du bureau opéré, Orion cherche encore et toujours à s’adapter aux demandes de ses clients avec une stratégie que son dirigeant résume ainsi : « partir d’une offre simple pour aller vers une offre sur-mesure et même des offres à tiroirs ». S’adapter, pour celui qui a pratiqué et même enseigné l’Aïkido, semble être une seconde nature. « C’est un art martial dans lequel le physique passe au second plan et où seuls comptent la concentration, le respect de l’autre », ainsi que la ténacité. Une autre qualité dont il a fait preuve dans son parcours, depuis son Algérie natale jusqu’au bureau avec vue sur Seine qu’il occupe aujourd’hui dans le hangar portuaire réhabilité, le « 107 ».
Né à Alger, Mounir Meghrebi a rejoint la France après avoir passé deux fois son Bac : un Bac algérien et un Bac français, obtenu en candidat libre, qui va lui ouvrir les portes de l’université de Rouen. Elevé dans une famille « où l’on parlait français », il rejoint en 1994 les bords de Seine pour retrouver son frère ainé, installé depuis déjà trois ans dans la capitale normande. Et si son premier choc est d’abord climatique, il est aussi frappé par « la moyenne d’âge des gens dans la rue », un peu plus élevée que ce qu’il a connu jusqu’alors. « Quand on arrive du Maghreb, c’est évident ! », sourit-il aujourd’hui. Dans ces années d’études, il garde également le souvenir de son job de veilleur de nuit à l’Hôtel de Dieppe, une institution rouennaise qui fait face à la gare rive droite. « J’y ai beaucoup appris dans la relation client et cela m’a toujours servi dans mon approche professionnelle », revendique-t-il. De ses années d’études et plus encore d’alternance, il garde néanmoins le souvenir d’un parcours du combattant chaque fois qu’il devait renouveler son permis de séjour. « Mais j’avais la chance de très bien parler le français », lâche-t-il.
Un Deug d’informatique, puis un DUT génie électrique et informatique industrielle l’amènent progressivement à démarrer son parcours professionnel en alternance chez Hewlett Packard pendant qu’il prépare un diplôme d’ingénieur au Cesi. Il poursuit l’aventure au sein d’Amadeus, alors filiale d’Air France, pour au final passer huit ans à faire la navette entre Paris et Rouen, où il continue d’habiter, avant de revenir là où tout a commencé. Après deux nouvelles expériences professionnelles en Normandie chez Web & Solutions puis chez Interaction, il se lance à 35 ans dans le grand bain de l’entrepreneuriat, certain qu’il a « la maturité et l’envie pour le faire ». En 2010, donc, il crée la société de marketing digital « 6bles ». Avec déjà l’idée de proposer à des clients qui ont des besoins mais qui ne trouvent pas le bon prestataire d’intervenir en gestion de projet. « Le e-commerce démarrait à peine et j’ai eu l’idée de jouer ce rôle d’architecte et de coordinateur » qui manquait alors.
Initiateur de la filière digitale normande NWX
En parallèle, avec d’autres acteurs de cette filière normande – rouennaise à l’époque – naissante du digital, il fonde l’association Normandie Web Xperts (NWX). Un collectif qui entend fédérer des entreprises isolées et manquant cruellement de visibilité sur la scène locale. Une des premières décisions de cette jeune association aura consisté à réunir la dizaine de membres au sein d’un même immeuble dans le quartier populaire des Hauts de Rouen. « C’est là que l’idée d’Orion est née », assure aujourd’hui Mounir Megherbi, également à l’origine de la création du premier coworking digital rouennais: la Cantine numérique.
Le déclic interviendra une dizaine d’année plus tard, quand, à la recherche de locaux pour mener à bien son projet, il croise la route de Jean-Louis Louvel, dirigeant emblématique de la place rouennaise. Le fondateur du groupe PGS cherchait alors à se séparer du plateau où siégeait jusque-là le quotidien Paris-Normandie dont il venait de céder ses parts. Orion 1.7 pouvait dès lors prendre son envol. « Je cherchais depuis deux ans un lieu pour créer cet écosystème », un concept inspiré par ces nombreux voyages outre-Atlantique. Aujourd’hui, ses clients sont des PME, ETI, grands groupes qui cherchent à renforcer leur implantation locale : « ce qui leur plait, c’est que c’est leur bureau, mais clé en main avec un service premium ». Pour absorber la demande, Orion a même ouvert récemment une seconde localisation sur la ZAC du Madrillet au sud de Rouen et en bordure de l’autoroute A13. Là encore pour répondre « à une demande de nos clients ».